Indémodable, incontournable... le bâtiment bioclimatique.


La conception bioclimatique : rien de nouveau sous le soleil…

Construire de façon bioclimatique pourrait se traduire par « construire en mettant en harmonie le climat avec la biologie humaine ».
Depuis que le monde est monde, l’être humain a adopté la conception bioclimatique pour son habitat.
Afin d’assurer sa survie et son confort, il a constamment bâti son lieu de vie en fonction du climat, lui apportant des modifications nécessaires au fur et à mesure que la terre se réchauffait. 
Ainsi, il a réussi à tirer un maximum de profit de ce que la nature lui offrait.

C'est ainsi, qu'en Afrique subsaharienne, la conception architecturale incluait systématiquement des protections contre les surchauffes du soleil et maximisait la ventilation assurant le confort thermique sans accès à l'énergie.

La conception bioclimatique n’est donc pas, loin de la, un concept nouveau.
Elle a juste peu à peu disparu des tables de dessin des architectes et ne tient plus lieu de reflexe pour le constructeur, victime de la Modernité.

Sur le complexe chemin vers la modernité, on est à l’heure des bâtiments fours.
Modernité : caractère de ce qui est moderne. Moderne, adj.: 1. Qui appartient au temps présent ou à une époque relativement récente. 2. Qui bénéficie des progrès les plus récents.

A priori, puisque le monde est supposé être dans un processus d’amélioration continue, on pourrait croire que « modernité » rime avec « rendre meilleur », « changer en mieux ».
C’est hélas, plus complexe que cela.
En effet, chez l’homme être moderne passe souvent par une rupture avec la nature, un rejet de ce qui est ancien, une glorification de la technologie.
Oubliés la simplicité, l’humilité et l’immense enseignement du patrimoine traditionnel !

Dans l’architecture africaine au sud du Sahara en général, et au Sénégal en particulier, ce passage à la modernité s'est caractérisé par l’abandon pur et simple des matériaux de construction traditionnels comme la terre, le bois, et l’introduction massive dans les usages de matériaux produits industriellement, bon marché, faciles à mettre en œuvre.
Sans être exhaustif, on peut citer par exemple : le ciment omniprésent, les tôles ondulées et bac alu zinc pour les toitures, les carreaux et vitrages en façade, les membranes bitumineuses et les produits flint coat pour l’étanchéité, la laine de verre pour l’isolation… 
Ces matériaux modernes répondent à un besoin mais dans la majorité des cas, leur utilisation inadaptée est source d’inconfort thermique.

L’autre conséquence de l’ouverture à la modernité, est la non prise en compte des données climatiques locales dans la conception architecturale des bâtiments, car par facilité,  on compte désormais sur l’énergie pour compenser l’absence de confort thermique.
C’est ainsi que la quasi totalité des bâtiments dans les villes du Sénégal ont une structure en béton armé sans protection solaires intégrées, avec des vitrages parfois exposés plein ouest et plein est, une toiture plate directement soumise au rayonnement solaire, et une faible ventilation naturelle.
Ces constructions sont des fours naturels, mais peu importe, puisque qu’en présence de ventilation et de climatisation elles redeviennent confortables.

Faire rimer bioclimatique et moderne.

Si comme on vient de le voir, la technologie a modifié notre façon de construire, l’être humain lui, a très peu évolué physiquement depuis plusieurs siècles.
Ses attentes physiologiques n’ont pratiquement pas changé.
Il a toujours besoin, pour son confort thermique, que son habitat mette en harmonie sa biologie avec le climat environnant.
Or ce n’est plus le cas !
Dans le nouveau bâtiment « four » l’humain Sénégalais suffoque, même si ce « four » est très moderne et est construit avec le meilleur ciment et de larges vitrages panoramiques !

L'accès à la modernité a modifié notre mode de construction; mais pas en mieux.
Elle nous laisse aujourd’hui 2 alternatives qui n’en sont pas :
- soit utiliser pour assurer le bien être à l’intérieur des bâtiments, une énergie qui devrait être destinée à ceux qui n'ont pas accès à l'électricité, dans un pays ou plus de la moitié de la population vit dans une vraie misère énergétique,
-  soit vivre dans l’inconfort thermique chronique.

Ces 2 possibilités ne sont pas acceptables à moyen terme.
La voie vers d’autres alternatives passe par une réintégration de la conception bioclimatique dans nos reflexes de constructeurs et par un travail de réappropriation et d’actualisation de celle ci afin de l’adapter à nos réalités et goûts d'aujourd'hui.
Car la modernité à plusieurs visages. A nous de choisir celui qui nous ressemble le plus.

Commentaires